Sylvie Amblard ou l’art de révéler la puissance enfantine
Les spectacles de fin d’année sont souvent des punitions.
Des punitions pour les enfants qui deviennent saugrenus d’exister dans des postures et des gesticulations improbables. Des punitions pour les oreilles, quand certains s’évertuent à balancer les derniers tubes du moment sans respect de la réglementation des décibels. Des punitions pour les parents obligés de subir les autres enfants des autres parents dont on se fout un peu car chacun filme en plan serré ses propres rejetons, le portable levé vers le ciel, les yeux détournés de ce qu’il y a sur scène.
Quand il y a une scène.
Car on subit parfois les podiums improvisés en bois et en métal trempés par les pluies estivales et les kermesses associées où le dévouement des parents bénévoles et la folie enfantine gavée de sucre se font concurrence dans une excitation épuisante.
Mais, salle Nelson Mandéla, avec l’école Jean de la Fontaine, c’était différent.
Je n’ai pourtant pas de mioche attitré dans cette école, si je suis là, c’est juste pour voir, au cas où et puis, mes mioches à moi sont spectateurs avec moi.
J’ai vu deux spectacles, le premier raconte l’état de nature, l’état de nature de l’enfance. Dans un ballet en mouvement permanent, les enfants traversent le plateau armés d’arrosoirs, de pelles…
La précision de leur chorégraphie et la justesse de leur interprétation sont merveilleuses de vérité. Sylvie danse parmi eux, on ne peut pas tenir son émotion, quand on voit les enfants se cacher, interpréter les saisons de la terre. Le spectacle n’est pas bavard, ni prétentieux. Il laisse à l’enfant sa place et sa nature d’enfant. Ils ne sont ni grimés, ni mal déguisés, ni rabaissés à être des amuseurs innés. Ils sont juste là et ils racontent leur histoire. Ce sont des enfants de maternelles, ils le restent et ils nous emportent dans leur puissance d’enfant.
Le second spectacle avec des plus grands est émouvant, plus difficile. Il est question d’émotion : colère, joie, tendresse. Des suites de tableaux s’enchaînent autour de portraits de ces mêmes enfants, en noir et blanc, en gros plans.
L’universel émotionnel est dit sans discours, sans mensonge, sans tricherie. Et là encore, les enfants apparaissent dans leur complexité.
Parce que Sylvie Amblard ne simplifie jamais les enfants.
Bravo à l’école maternelle Jean de la Fontaine,
Bravo à Catherine Cerdano, Catherine Erbacher, Catherine Simon et Agnès Besse.